Cette fin d’automne n’est pas folichonne. Les ventes de voitures électriques sont à la ramasse. Et les aides à l’achat sont revues à la baisse. Reste que la transition vers les voitures à watts se fera malgré tout, et pour de multiples raisons.
Ça sent le sapin pour la voiture électrique. Baisse et limitation du bonus écologique aux voitures européennes en France, suppression totale du même bonus en Allemagne, et ventes en berne partout dans le monde : la bascule vers les voitures zéros émissions connait des turbulences.
Faut-il pour autant enterrer l’eau du bain avec la fée électricité ? Bien au contraire, et pour de multiples raisons. En commençant par rétablir quelques vérités. Contrairement au fantasme véhiculé par des réseaux sociaux toujours aussi approximatifs, l’Europe n’est pas la seule région du globe à mettre en place des mesures pour basculer vers le tout électrique, ce qui sera le cas en 2035 pour le vieux continent. Ce sont les principaux marchés mondiaux qui opérent cette transformation. L’Europe, bien entendu, mais aussi la Chine et pas pour des raisons écologiques, mais totalement économiques. L’empire du milieu a raté le thermique ? Il se rattrappe sur l’électrique et c’est aujourd’hui le leader mondial en matière de batteries. Pour booster ce marché, il impose des quotas sur son propre sol et pousse ainsi l’intégralité des constructeurs du monde à s’y plier s’ils veulent leur part des 23 millions de voitures vendues là-bas chaque année.
–> (Re)lire mon interview de Jean-Luc Moreau sur les voitures électriques
Quant aux États-Unis, eux aussi, depuis que l’administration Biden est en place, programment leur transition vers le zéro émission. Une administration qui les aide financièrement et a lâché 314 milliards de dollars pour y parvenir. « Oui mais si Trump revient aux affaires, c’en est terminé pour l’électrique » expliquent les pessimistes. Sauf qu’il a déjà été l’hôte de la Maison Blanche pendant quatre ans, en favorisant les bons vieux V8 à pétrole. Et que lui ont répondu les Big Three (General Motors, Ford et Chrysler) à l’époque ? Qu’ils n’allaient pas développer de nouveaux moteurs thermiques alors que leurs principaux marchés, l’Europe et la Chine (35 millions de voitures à deux, bon an mal an) basculaient vers l’électrique. Et leur réponse sera de même si le populiste show man revient à Washington.
Voitures électriques : déjà plus de 100 000 bornes en France
Bien sûr, les réticences à l’achat de voitures électriques restent nombreuses. « Y a pas des bornes partout » râlent les récalcitrants. Certes. Mais dans ce domaine, la France est plutôt bien lotie puisque l’hexagone vient de franchir la barre des 100 000 bornes au mois d’avril dernier. « C’est compliqué à utiliser » continuent les réfractaires. C’est vrai, un peucomme si pour faire son plein d’essence, il fallait s’équiper d’une carte bleu différente en fonction du distributeur. Une pour Shell, une deuxième pour TotalEnergies et une troisième pour Leclerc. Mais en ce qui concerne les infrastructures de recharge, un petit comparo et une date s’imposent. Aux 100 000 bornes, il faut opposer les 11 451 stations services actuellement ouvertes en France. Soit dix fois moins, ce qui est normal étant donné l’autonomie plus limité de l’électrique. Quant à la date, il faut garder en mémoire que la première pompe à essence française a été crée en 1927, alors que l’automobile est née en 1885. Concernant son retard, l’électrique a donc un peu de marge. D’ailleurs, si l’on roule au pétrole aujourd’hui, c’est uniquement lié à la découverte, en Amérique, d’immense puits dans les années 1910. Ce qui a poussé les constructeurs de l’époque vers le moteur à combustion, puisque jusque là, l’électrique et le thermique étaient en ballotage très hésitant dans les cartons des ingénieurs.
On nous explique aussi que l’électrique, c’est bien trop cher. Encore exact. Mais faut-il rappeler que la démocratisation de l’automobile s’est vraiment déroulée après guerre en France, soit 70 ans après son invention. Et en plus, il est fort à parier que les prochaines batteries dites « sèches » et contenant beaucoup moins de terres rares, devraient être moins chères et leur autonomie sera encore améliorée. Leur arrivée est attendue d’ici 5 ans.
Enfin, une dernière raison explique qu’à la fin du match l’électrique va s’imposer. D’abord dans les pays riches (Europe, Chine, États-Unis) avant de se mettre en place sur le reste de la planète. Cette raison est purement économique. Les constructeurs ont tant investi dans cette bascule (on évoque le chiffre de 180 milliards pour le seul groupe Volkswagen) qu’il est hors de question pour eux de revenir au pétrole, car ils perdraient l’intégralité de leur mise. Il en va donc de leur survie.
Mais que les inconditionnels de la pétrolette se rassurent : les voitures exclusivement électriques, ce n’est que pour 2035 et l’âge moyen du parc automobile étant aujourd’hui de 11 ans, ils pourront tranquillement circuler jusqu’en 2046 au moins. De quoi voir venir, et de quoi faire quelques économies, puisque d’ici là, l’essence devrait fortement augmenter. Une simple question de demande qui diminue, et de forages de plus en plus difficiles à opérer.