Des femmes en F1 dans un baquet ou un paddock ? C’est pas gagné. En 72 ans de Formule 1, seulement 6 des 885 pilotes étaient des femmes et seules deux d’entre elles ont pris le départ d’un Grand-Prix : Maria Teresa de Filippis en 1958, et de Lella Lombardi, unique femme à terminer un grand prix dans les points en Espagne en 1975. 

Lella Lombardi, la tigresse de Turin

A la tête des ressources humaines d’Alpine, Claire Mesnier, tente pourtant par tous les moyens de faire entrer des filles dans ce milieu ultra testostéroné. Au-delà du recrutement, l’écurie de F1 Alpine lance un programme pour accroître la place des femmes ingénieures et pilotes.

Claire Mesnier, directrice des ressources humaines d’Alpine tente le pari de la formation de jeunes pilotes au féminin

Alors qu’aujourd’hui même, Carlos Sainz prend le départ du Grand Prix de France depuis le fond de la grille, aucune trace de femmes devant ou derrière lui dans cette douzième manche du championnat du monde de Formule 1 sur le circuit Paul Ricard. La grille est 100% masculine. Idem dans les stands où s’agitent les mécaniciens et les ingénieurs. Comme le décrit Claire Mesnier, « A l’Estaca, la grande école d’ingénieurs en mécanique française, il n’y a que 8 % de fillesEt même si le sport mécanique se veut mixte, sur le terrain cela est loin de se vérifier« .

Claire Mesnier et le programme Ras(h)er

Alors, avec la DRH d’Alpine, Claire Mesnier fait tout ce qu’elle peut pour dégoter une femme qui sera un jour capable de s’aligner sur la piste à bord d’une F1. Comment ? En remontant en amont dans l’espoir de faire naître des vocations en proposant une filière de formation dédiée aux filles.

Le programme Rac(h)er pour féminiser le sport auto

Face à la trop faible représentation féminine dans les filières de sport automobile, l’écurie franco-britannique Alpine lance Rac(h)er, un mot mêlé dans lequel s’enchevêtrent « racer » (pilote) et « her » (elle). Un programme pour parvenir enfin à une diversité et une égalité des chances dans le sport et l’industrie automobile. Car Alpine souhaite également que les femmes travaillent au sein de l’écurie et de la production des voitures de série. Le but selon Claire Mesnier : « Faire tomber les barrières sociétales et les clichés qui empêchent les femmes d’accéder à l’élite du sport automobile« .

Une pilote de F1 en 2030

Pou qu’une femme intègre le cercle très fermé des pilotes de F1, Alpine considère que 8 années sont nécessaires. Car pour les former, il faut déjà en passer par le karting puis tous les échelons pour atterrir dans un baquet de F1. Claire Mesnier, qui supervise la mise en place et le bon déroulement du programme, compte mener « des recherches physiques et psychologiques avec des médecins, des kinés et l’Institut du Cerveau de Paris afin de mieux appréhender les besoins féminins. »

Jamie Chadwick : la femme la plus en verve pour trouver un volant en F1

Jamie Chadwick : la femme la plus en verve pour trouver un volant en F1

Depuis Maria de Villota, blessée grièvement en 2012 lors d’une séance d’essai, la Britannique Susie Wolff (4 séances d’essais libres pour Williams en 2014 et 2015), la Néerlandaise Maya Weug (en 2021) et l’Espagnole Laura Camps Torras (en 2022) qui ont intégré la Driver Academy Ferrari, il ne se passe pas grand chose dans la féminisation du monde de la F1. Seule l’Anglaise Jamie Chadwick, vainqueure de deux titres en W Series (2019 et 2021), aspire encore à trouver un volant en F1. Peut-être sera-t-elle la première femme depuis Susie Wolff, il y a 8 ans, à disputer une séance d’essais libres en F1 ? Et pourquoi pas avec Alpine, grâce à son programme soutenant l’égalité des chances, même si Jamie Chadwick est aujourd’hui pilote de développement chez Williams.

Mais pour concourir en F1, il faut passer par les séries junior – Formule 3 et Formule 2 – et c’est extrêmement physique. En F1, le côté performance physique humaine est mal compris. Rendre les volants plus fins, avancer les pédales, élaborer des baquets plus larges parce que, tout simplement, les femmes ont un bassin plus large… Est-ce que ces éléments négligés pour les filles peuvent suffire à leur faire accéder à l’univers de la F1 ? Aujourd’hui, les freins sont très puissants, mais il faut quand même y appliquer une quantité énorme d’effort. Les pilotes sont enfermés, les températures dans le cockpit sont de 40, 50 degrés. Les câbles chauds les frôlent. La fatigue physique serait-elle trop intense pour les femmes pilotes ? En F1, il faut être en forme, et il faut, d’après tous les pilotes, une force incroyable dans les épaules.

L’avenir dira si ce sont des facteurs limitants et s’il est possible de créer des monoplaces plus adaptés au corps féminin. Ou si, tout simplement, la Formule 1 qui monte à 300km/heures et fait grimper les degrès celsius jusqu’à 50 degrès, restera définitivement trop physique pour les femmes.