Dieselgate : valse franco-française

Après Renault, c’est au tour de Peugeot et Citroën de se retrouver aux prises avec la justice, suite à des tests sur ses moteurs diesel effectués en 2015. Explications autour de cette nouvelle valse de dieselgate.

Les évènements se sont succédé rapidement. Après Renault, mis en examen mardi, c’est au tour de Peugeot et Citroën de se voir signifier la même sentence. Mais si les trois marques françaises se retrouvent assignées en justice en moins d’une semaine, le dossier d’instruction aura mis 5 ans à être constitué.

Tout a commencé en 2015, année noire pour l’automobile. Une ONG américaine fait alors éclater le scandale : l’Allemand Volkswagen aurait installé à bord de ses modèles diesel un logiciel permettant de minimiser les rejets et qui n’entrerait en action qu’au moment des tests d’homologation. Une manière de passer les tests en question haut la main. Le scandale du dieselgate est mondial, d’autant que VW reconnaît la fraude et accepte de verser une amende de plus de 25 milliards de dollars aux autorités US.

La commission royale ausculte les émissions

Les répercussions de l’affaire sont planétaires et de nombreux pays décident alors de procéder eux aussi de vérifier les émissions des autos qui sont vendus sur leur sol. En France, une commission se réunit sous l’égide de Ségolène Royal, alors ministre de l’environnement. Elle décide de passer aux crible nombre de modèles de toutes marques, dont, évidemment, ceux des constructeurs français. Il aura donc fallu attendre cinq ans pour que tombent les conclusions de l’enquête qui a suivi ces tests et les mises en examen qui ont été signifié, dès mardi, au groupe Renault, mais aussi à ses rivaux Peugeot et Citroën.

Une tromperie fautive

Les trois marques ont reçu les mêmes notifications de la justice qui leur reproche des « faits de tromperie portant sur la vente de véhicules diesel Euro 5 intervenue en France entre 2009 et 2015 ». Qu’en est-il ? Selon le parquet, le résultat des tests effectués en 2015 par la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes) au nom de la commission Royale, ont mis à jour de gros écarts d’émissions, surtout en ce qui concerne les Nox (oxyde d’azote), entre les chiffres des autos au moment de leur homologation et ceux mesurés sur des voitures roulant dans des conditions normales d’utilisation. D’où ces mises en examen en série pour « tromperie », puisque l’acheteur d’une Renault, Peugeot ou Citroën de ces années-là, n’était informé que des valeurs officielles d’émission, et non des valeurs réelles.

De lourdes sommes provisionnées

Du côté des constructeurs incriminés, on se prépare à provisionner des sommes conséquentes destinées à payer les futures amendes. Du côté de Peugeot, 10 millions sont ainsi bloqués. Un montant qui s’élève à 20 millions chez Renault. Bien sûr, les trois marques n’entendent pas se voir condamnées sans réagir. Le Losange explique, comme souvent en pareil cas, qu’il est content d’avoir enfin accès au dossier. Quant à Stellantis (qui regroupe Peugeot, Citroën et Fiat, notamment), le groupe est sur la même ligne, ajoutant qu’il compte bien se défendre contre des allégations qui n’ont pas encore été discutées dans le cadre d’une procédure contradictoire. Dans un communiqué, le constructeur précise aussi que ses filiales « sont fermement convaincues que leurs systèmes de contrôle des émissions répondaient à toutes les exigences applicables à l’époque.»

Une décision judiciaire arrivée trop tard ?

Quel que soit l’issu du procès dont la date n’est pas encore connue, ces mises en examen semblent tomber tard. Le temps de la justice n’est certes pas celui de l’industrie, mais les affaires dévoilées en 2015 au moment du dieselgate et de ses ramifications françaises ont marqué une rupture dans l’automobile mondiale. Contraints et forcés par les pouvoirs publics, les constructeurs se sont adaptés. Les normes ont changé et ils s’y sont pliés, comme ils se plient aujourd’hui à l’éléctrification en marche. Les diesels se conjuguent au passé, leur trop plein d’émissions aussi. C’est donc le procès d’une époque révolue qui s’ouvrira.